• 18 mai 2017
  • 3  min

Le français sur les réseaux sociaux : mort ou vif ?

On se moque souvent du jargon des agences de communication en matière de digital : par exemple, une phrase comme « Grâce à nos inputs, nous avons pu augmenter le growth hacking et étendre le reach en évitant le bad buzz » trouvera rarement grâce aux yeux des puristes de la langue française. Pourquoi aujourd’hui ne pas voir le verre à moitié plein en constatant qu’au côté d’un anglais jugé hégémonique, le français se fait sa place au soleil des réseaux sociaux ?

 

Imposer, c’est perdre

Malgré l’acharnement des hommes politiques à promouvoir une langue française inscrite dans la pierre (la loi Toubon de 1994, le succès récent d’un vocabulaire traditionnel comme  « perlimpinpin » et « galimatias » d’Emmanuel Macron), une seule conclusion s’impose : l’usage fait la langue.  On n’a jamais réussi à imposer le « mot-dièse », ni le « courriel » ou encore pire, l’horrifique « pourriel », dans nos « clavardages ». Autrement dit, la langue est têtue et vivante,  malgré les diverses tentatives d’encadrement rigide depuis 1635 (fondation de l’Académie Française).

Pourquoi  ce succès initial de l’anglais ? Bien évidemment, au-delà de l’aspect commercial, l’anglais est doté d’une structure souple qui permet la création facile et libre de nouveaux mots et expressions (Ainsi un teenager devenu grown-up, peut finir self-made-man).

L’anglais, c’est aussi cette langue qui nous permet de parler de sentiment sans y toucher : il est plus facile d’assumer le fait d’avoir des friends, dont on like les publications, alors qu’on moque régulièrement l’hypocrisie de l’expression « ami Facebook ». En gros les Français souffriraient d’un trop-plein de puritanisme linguistique : on veut que les mots fassent sens, que le signifiant reflète le signifié, selon le concept du linguiste Roland Barthes. Chaque mot est donc longuement soupesé, chaque néologisme évalué avant de recevoir l’aval administratif et populaire. Ainsi, selon le Quid ?, l’anglais disposerait de 400.000 mots, pour seulement 170.000 en français. Dès lors : comment combattre ce mastodonte lexical ?

 

Absorber, c’est gagner

Fort heureusement  sur les réseaux sociaux, la viralité vient récompenser la créativité et l’originalité. Ainsi récemment la campagne Monoprix #LaitDrôleLaVie est venu rappeler à quel point les Français sont attachés à la pratique du calembour :

Ce packagings futés, fluorés, dépassent le marketing et deviennent des espaces de liberté.

 

Plus prosaïquement, en mars dernier, Hépar osait sortir une campagne culottée pour évoquer, sous diverses expressions fleuries, le fait de faire la grosse commission. La mission est totalement remplie : les internautes sont hilares, le message transmis : Hépar vous fait rire et facilite votre transit, tout en mettant à l’honneur le français.

 

 

Aux côtés des #ThrowbackThursay et des #FollowFriday, les hashtags #MardiConseil #JeudiConfession et #VendrediLecture se portent inlassablement bien. Ça et là, dans la langue, on entend que cette paire de chaussures est « instagramable » que Facebook et Instagram se « snapchatisent », qu’on procède à la « gamification » d’un processus de recrutement. On assiste à ce petit miracle quotidien : le français se transforme, des références étrangères s’installent. Sans devenir un ersatz, le Français à son zénith, avec zéro convulsion mais sur un rythme allegretto, se nourrit des autres langues. Le français n’est pas mort, il est, au contraire, bien vivant..

M.DB.

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